Scotch Whisky, la part des anges
Quand on visite l’Écosse, on a forcément des idées sur ce qu’on voudrait faire : écouter de la cornemuse, visiter un château hanté ou manger du saumon fumé. Ce sont des grands classiques.

Mais avez-vous prévu de visiter une distillerie de Scotch Whisky ? Non ? Eh bien c’est clairement une sortie à faire. Il y a toute la partie production à comprendre bien sûr le maltage, la distillation, les beaux alambics… mais ce qui m’a le plus impressionné, c’est le vieillissement.

Pour moi, c’est un processus quasi magique. Je n’exagère pas. Quand le futur whisky passe la porte d’entrée du chai, c’est encore un liquide transparent. C’est difficile à croire, hein ? Et au moment de ressortir, il a une couleur ambrée et une énorme palette aromatique.

Alors, derrière les portes du chai, qu’est-ce qui se passe en fait ? La réponse est simple : de nombreuses années ! Trois ans minimums pour un Scotch whisky, mais cela peut facilement monter à 8 ans, 12 ans, voire 50 ans.

Et ça fait quel bruit le temps qui passe ? Dans un chai de vieillissement, c’est le grand silence … comme on a rarement l’occasion d’en écouter. J’ai même un peu honte de marcher, parce qu’on entend le bruit de mes pas. Du coup, j’essaie de me faire tout petit.

Il y a quelque chose d’émouvant dans ces fûts alignés les uns à côté des autres. On voit bien qu’ils ont tous des histoires à raconter. Avant d’être utilisés pour le scotch whisky, ils ont contenu du Bourbon en Amérique, du Xérès en Espagne, du Porto au Portugal ou encore du vin, en France et dans d’autres pays.

C’est grâce à cette première vie qu’ils sont ici, parce que le chêne a absorbé plein de couleurs et d’arômes différents. Et c’est ça qu’ils redonnent au Scotch whisky. Au fil des années, tous les goûts se mélangent et s’affinent.

J’aime bien le mot “Alchimie”, pour décrire ce qu’il se passe. La distillation révèle les arômes de l’orge maltée, parfois teintés de notes tourbées. Le chêne apporte de la rondeur et du boisé. Plein d’arômes apparaissent, vanille, miel, céréales, fruits secs …

Mais pour cela, il faut aussi… laisser s’échapper… la part des anges. C’est une jolie expression, pour décrire un phénomène naturel. Chaque année, une partie du contenu des fûts s’évapore. De cette manière, la force du whisky baisse.

Si les anges prennent leur part sans faire de bruit, ils laissent quand même des indices de leur passage. Les murs des chais sont toujours sombres. Vous savez pourquoi ? C’est à cause des vapeurs de whisky, qui viennent nourrir un tout petit champignon noir. Ça contribue à créer une ambiance mystérieuse.

À l’extérieur du chai, autour des fenêtres, on peut aussi voir ces murs noircis. Comme ça, quand on arrive dans une distillerie, on sait tout de suite où se trouvent les tonneaux de whisky. Ils vieillissent dans le bâtiment le plus noir ! Logique.

Bon, il va falloir que je quitte ce havre de paix. Mais j’ai encore envie de profiter un peu de cette expérience hors du temps. Je me tais, pour écouter le silence. Si vous êtes assez attentifs, pour pourrez aussi l’entendre. Chut… des anges passent.